Laurent Tixador est ce que l’on pourrait appeler un hyper actif. Pour lui, une journée de pluie frôle l’horreur du temps suspendu dans lequel il s'inscrit pourtant parfaitement. Chaque élément de ses dispositifs appelle un nouvel objet à produire dans une suite infernale. Le cartel, tout comme la salle d’exposition, n’appartenant pas à son univers, la question se pose donc de savoir par quelle technique inscrire le nom de ses productions sur les pièces qu’il réalise ici.
Par une journée de pluie, il découvre au fond de l’atelier une roulette de dentiste qu’il teste sur un os, puis sur un bout de buis jusqu’à aboutir à la marguerite, nom de code : le bit en bois. Une fois encore, comment repartir de rien pour une production hyper performante ? User du 0 et du 1 de l’informatique, des data centers et autres clouds pour produire d’autres signes, une autre typographie pour une écriture définitive et si fragile puisque désormais, pour faire récit, tout est à réinventer, à la lettre près. La marguerite est une forme simple, ronde et saillante qui, usée avec une certaine dextérité, reproduit dans la terre une typographie nouvelle. Ainsi, notre cloud d’argile est un ensemble de tablettes qui rappelle les prémices cunéiformes, l’origine des écritures. Cette technique raréfie les mots, leur donne un poids et dissout le bavardage. Plus que n’importe quel disque dur, cette écriture promet de résister à toute attaque du temps et autres nuages électromagnétiques. Ces pièces de terre cuite signalent, au fil des mois, l’ensemble du domaine et nous orientent là où l’artiste pose son regard. Malgré leur potentiel d’éternité, certaines ne résisteront pas aux maladresses du chat. La tablette « Oh bordel » est brisée et, dans ce récit, le vivant l’emporte résolument.