Matthieu Molet est un architecte qui fait son chemin de plasticien, géomètre, botaniste, ethnologue en savant arpenteur. Pour lui, le territoire, avant d’être un paysage, est une respiration, une perspective, un mouvement.
Du point à la graine, de la racine à la tige, il interroge, déconstruit, explore et se réapproprie les gestes, les usages, les goûts et les récits de la matière organique. Au cœur de son arpentage, des questions en rafale : comment peut-on subsister quand on dépend de quelques graines ? Comment ces graines deviennent-elles plantes, outils, aliments, textiles ? Qu’est-ce que ces cultures créent comme vocabulaires, comme toponymies ? Comment est-ce qu’on gringonne avec le gringon ? Qu’est-ce que l’usage de ce balai végétal dit de l’espace et du temps ?
Ses recherches sont si minutieuses, cartographiées et référencées que Matthieu pourrait donner le sentiment de simplement ressusciter les arts et traditions populaires du territoire. À l’inverse, son approche est profondément poétique et contemporaine. Ses arpentages, ouverts à toute bifurcation, sont comme une carte miroir qui interroge la distance qui nous sépare des espaces où vivre reste possible, là où le vivant est inconfortable, certes, mais où il se révèle sous chacun de nos pas.
À partir d'une graine de Ruscus aculeatus qu'il a savamment étudié, il laisse pousser un arbuste qu'il cultive. Sélectionne chaque branche, chaque tige pour les lier. Il en fait un balais, l'outil d'un cantonnier dont, par la fiction, il réhabilite le métier et son rôle social. Ce balais devient un geste, un champ, une fonction oubliée.
Inspiration(s) :
La complexité de notre temps exige une attention au détail, un soin à ce que l'on ne voit pas. Plus encore la capacité à produire des fictions pour faire lien autour de ce qui souffre d'être devenu futile, invisible.