Camille est designer, spécialisée dans les outils participatifs et prospectifs. Rémi est diplômé en architecture, spécialiste des territoires en transition. Ensemble, ils explorent les régions et leurs écosystèmes et questionnent nos façons de « faire » territoire.
Leur projet de résidence travaille la notion de biorégion. Souvent considéré comme une branche de l’écologie profonde et de l’environnementalisme radical, le biorégionalisme (conceptualisé et propagé par les activistes américains Peter Berg et Judy Goldhaft dans les années 1970-80), propose une approche proactive visant la formation d'une harmonie entre la culture humaine et l'environnement naturel. Pour faire territoire, le biorégionalisme ne pense pas en termes de frontières administratives, mais combine une série d’éléments spatiaux en s’appuyant sur les principes de l’écologie du paysage, de la biogéographie insulaire ou des espaces sociaux que chacun dessine. Technique, cette approche est aussi sociale, environnementale et philosophique. C’est une base de concertation et de démocratie locale pour vivre et comprendre autrement son territoire.
Au début de leur résidence, Camille et Rémi ont en tête d’associer dans un même projet la possibilité d’un travail singulier et différent sur chaque territoire et le fait d’élaborer une sorte de méthode, d’outil que l’on puisse répliquer. Leur idée est de produire un outil social. Ils partent de l’étude des bassins-versants qui occupe une place centrale dans le biorégionalisme (les bassins-versants alimentent les rivières qui structurent les vallées et donc les lieux de vie). Il se trouve qu’une des sources à l'origine de la Masse (rivière affluente de la Garonne, qu'elle rejoint au Nord de la ville d'Agen) est située sur le domaine de la Maison forte. Or, cette vallée n’est pas appréhendée comme un bassin de vie, mais comme un réseau de déplacements.
Camille et Rémi ont testé les différents sols argileux alentour pour mesurer leurs différences et révéler la continuité de matières qu’elles dessinent. Ils aboutiront à la réalisation du prototype d’une roue à aubes actionnant un tour de potier. Avec cet objet-alibi - le moulin à paroles - ils souhaitent provoquer une rencontre entre les habitants des différents villages de la vallée et permettre à chacun de co-construire un service de table de territoire, un menu commun, un rite d’accueil et de partage. Une discussion pour mieux comprendre, faire lien et donc vivre nos territoires.
>> Ces travaux ont nourri deux éléments importants dans notre démarche : une réflexion sur la question politico administrative du territoire versus une approche du bio-régionalisme et, une fois encore, l'appétit de modeler ensemble notre mémoire d'ici, même invisible.