La Maison Forte

L'art c'est politique

Quand le RN ouvre le débat...

Le 16 juin 2025, le Rassemblement National nous faisait l'honneur de nous descendre en pleine séance du Conseil Régional de Nouvelle Aquitaine. Nous ne produisons pas "'d'art pur", nous travaillons pour la démocratie et sommes engagés contre l'extrême droite et oui, l'art est politique. Une attaque, une mise au point.


Monbalen, le 19 juin 2025


Lettre ouverte à Madame Pauline Garraud, conseillère régionale du Rassemblement national (RN) en Nouvelle-Aquitaine, membre de la commission culture.


« La politisation de l’art est un rempart contre son instrumentalisation par le fascisme. »

Walter Benjamin


Madame,

Lors de la séance plénière du Conseil Régional de Nouvelle-Aquitaine le 16 juin 2025, le travail de La Maison forte a particulièrement retenu votre attention. Vous avez ouvert votre intervention par votre vision de l’art : « La culture nous élève, nous émeut, nous fait rêver.

Elle nous offre un ailleurs, une liberté, des repères et des valeurs (...) L’art doit rester de l’art et ne pas servir de cheval de Troie à un discours politique. L’art ne milite pas, il ne cherche ni à convaincre, ni à convertir (...) L’art n’est pas une déclaration politique déguisée. » Puis, vous avez accusé La Maison forte de détourner « l’étiquette culture » pour faire passer « des opinions militantes, idéologiquement marquées ». Vous dénoncez « nos rencontres sur la démocratie,... nos débats sur les élections, ... nos positions contre l’extrême droite ».

Nous souhaitons ici vous répondre.

Selon la définition largement adoptée de l’UNESCO, la culture façonne les sociétés ; elle est le socle du politique au sens premier du terme : ce qui concerne les citoyen·nes. Oui, art et politique sont liés : l’art interroge nos certitudes, nos représentations, nos croyances. Ce questionnement ouvert, pluriel, nourrit le débat démocratique – tout l’inverse d’un endoctrinement.

Votre vision de l’art, prétendument dépolitisée, est à la fois réductrice et profondément idéologique. Elle se traduit dans les politiques que vous prônez et les définitions que vous avancez. En janvier 2025, déjà, vous appeliez de vos vœux un « art pur » – chacun·e pourra s’interroger sur l’origine et les fondements de ces termes.

Partout où l’extrême droite gouverne, les politiques culturelles invisibilisent les femmes, l’écologie, la science, les minorités. Ce choix est culturel et politique. Aujourd’hui, au nom d’une « guerre culturelle » que vous revendiquez, vos élu.es font disparaître des livres dans les bibliothèques municipales, privent de subventions des associations, privatisent les politiques publiques de la culture pour en faire des outils de propagande. Votre approche affaiblit le dialogue, la diversité et la complexité de la société au profit d’une culture identitaire, exclusive et excluante.

Notre mission de fabrique coopérative des transitions nous impose de résister aux idées de l’extrême droite qui mettent en danger l’agriculture (au détriment des agriculteur·rices, vous défendez une agro-industrie libérale, dérégulée, polluante), la ruralité (votre vision archaïque entretient l’isolement et les fractures sur ces territoires), l’écologie (un sujet opportuniste à vos yeux) et le dialogue social (que vous confondez avec populisme).

La Maison forte n’a jamais soutenu de parti politique. Nous œuvrons, localement, avec nos moyens, au dialogue entre habitant·es, à la préservation du patrimoine, à la transmission de la mémoire paysanne, à l’accueil de jeunes en difficulté, à la protection de la biodiversité, à la création artistique dans un territoire rural souvent délaissé. Nous œuvrons à la démocratie, oui !

Notre projet revendique aussi « le droit à la poésie, à la liberté, au faire-ensemble ». L’art n’est pas fait pour enchanter un monde qui se fracture, mais pour aider à penser un avenir commun. C’est bien sur la vision de cet avenir que nos convictions s’affrontent.


Pour l’équipe de La Maison forte,

Victoire Dubruel, présidente